Tu avais l'habitude de voyager. Tu l'avais fais toute ta vie après tout, ta vie se résumait au Cirque et au Cirque seulement. Mais tu étais toujours excité à l’idée de voyager, ce qui pouvait être un calvaire pour les gens qui t’accompagnaient. Tu n’avais que six ans après tout, tu t’émerveillais de tout ce que tu voyais et bien que ça faisait déjà un sacré moment que vous étiez sur ce bateau – toujours sans savoir où vous vous dirigiez, d’ailleurs – tu continuais de t’éblouir de tout. C’était le jardin que tu visitais actuellement, pour la dixième fois probablement, mais il était tellement énorme que tu redécouvrais toujours de nouvelles choses, des plantes que tu n’avais jamais vu, des couleurs qui attiraient ton regard d’enfant.
Tu avais beau ne pas être particulièrement hyperactif, ça te manquait de ne pas pouvoir faire ton numéro, ne pas monter haut en l’air et regarder le public comme s’ils n’étaient que des fourmis. Tu aimais le voyage mais espérais arriver le plus vite possible, pour que tu puisses t’entraîner. Tu avais l’impression que tu n’étais plus capable des mêmes capacités, c’était assez stupide mais après tout, tu n’étais qu’un enfant. Et ton corps vieillissait malgré toi, sans entraînement régulier, tu n’étais pas sûr de lui faire confiance. C’était un sentiment étrange, de contrôler un Corps qui ne reflétait pas ta réalité. C’était difficile et compliqué; malgré cinquante-deux ans à devoir supporter cette situation, tu ne t'y habituerais probablement jamais.
Tu pris donc une décision. Tu te mis sur tes mains pour commencer à avancer. Tu découvrais ainsi le Jardin sous un nouveau jour et tu t’entraînais à rester le plus droit possible, c’était une capacité primordiale pour ton travail de funambule après tout. Tu n’en avais que faire du regard des autres, tu ne ressentais jamais de gêne et presque jamais de honte.